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Ma contribution au débat Métropolitain lié aux assises de la mobilité

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Monsieur le Président de Bordeaux Métropole

Après avoir participé aux échanges des assises qui se sont tenues le 24 octobre à Bordeaux, je vous fait part par écrit de ma contribution assortie de propositions.

Elle porte sur des aspects généraux mais également locaux avec comme objectif de réduire l’utilisation de la voiture et du transport routier émetteur de GES.

Mes propositions s'appuient sur des constats simples effectués à maintes reprises, notamment sur les conséquences de l'héritage d'aménagements et de règles, qui induisent depuis 50 ans la mobilité du quotidien.

Le trafic poids lourds ne cesse de croître, avec 90 % de part de marché du transport de fret, tandis que le fret ferroviaire ne cesse de diminuer : il est aujourd’hui en dessous des 10 % alors que le Grenelle de l’environnement fixait comme objectif 25 %. La France est le seul pays en Europe dans cette situation.

Un déplacement sur deux en ville effectué en voiture se fait sur une distance inférieure à 3 kilomètres et 75 % moins de 5 km.

Ainsi, les « bouchons » sont le fait principal de déplacements locaux, sur la rocade bordelaise comme dans la plupart des agglomérations. Je ne minore pas l’effet du transit poids-lourds, mais j’y reviendrai dans mes propositions.

Cette situation participe également à la pollution atmosphérique dans notre métropole avec des conséquences négatives sur nos conditions de vie.

Un phénomène historique, plus fort en Gironde.

Sur ce débat actuel concernant la thrombose automobile, il faut prendre de la hauteur et essayer de comprendre la situation.

Le problème de l’engorgement est le fruit d’une histoire, celle de 50 ans d’aménagement.

En 1968, la Gironde avait 1 million d’habitants, la ville de Bordeaux en comptait  266 000, soit 26 % de la population. Bordeaux représentait  56% de la population de la CUB (550 000 habitants).

En 1990, la Gironde avait 1,220 millions d’habitants, la ville de Bordeaux, 210 000 soit 17 % de la population de Gironde. Bordeaux ne représentait plus que 33 % de la population de la CUB (624 000 habitants).

En 2014, la Gironde avait 1.5 millions d’habitants, la ville de Bordeaux, 244 000 soit 16 % de la population. Bordeaux représentait 32 % de la population de la CUB (760 000 habitants).

En une cinquantaine d’années, la ville de Bordeaux a perdu en densité par rapport au reste de la CUB et de la Gironde.

Ces habitants sont allés en périphérie, (Mérignac, Gradignan, Pessac, etc.) mais également vers les cantons éloignés comme Castelnau (+ 13 000 habitants depuis 1982), Créon (+ 25 000 habitants entre 1975 et 2012), et je ne parle pas du Bassin dArcachon ou du Blayais.

Si on prend en comparaison Lyon, on s’aperçoit que si le phénomène a été le même mais de façon moins forte, la densité de population - deux fois plus d’habitants sur la même superficie - permet un meilleur rendement des réseaux de transport notamment. Ainsi le réseau de transport de Lyon génère 347 voyages par habitant par an tandis que celui de Bordeaux est à 190 pour 2017, alors que nous connaissons la plus forte croissance des réseaux urbains depuis plusieurs années. Cela illustre bien le retard que nous devons rattraper.

L’étalement urbain a fait son œuvre, avec simultanément deux autres phénomènes :  l’absence d’investissement dans le transport des années 60 jusqu’au tram et la croissance du modèle de la grande distribution (aspirateur à voitures), puisque la Gironde compte 30 % de surfaces commerciales de plus que la moyenne nationale. Il faut ajouter à ce cocktail, l’absence de politique foncière publique.

La situation que nous vivons est d’abord un phénomène physique : nous avons généré un mode de vie où vivre sans voiture est très compliqué, voire impossible dans de nombreuses situations.

La question qui se pose à nous est simple : faut-il continuer dans le même sens, accompagner le phénomène ou sérieusement raisonner différemment et remettre par exemple la voiture à sa juste place ?

La question est aussi philosophique. (no parking no business)

Il faut ajouter à ce phénomène d’étalement urbain, un élément positif certes, mais qui vient en quelque sorte aggraver la situation : c’est depuis une dizaine d’années le regain d’attractivité de Bordeaux et de la Gironde, puisque nous gagnons 15 000 habitants chaque année.

Tous ces éléments, qu’ils soient positifs ou négatifs, viennent aggraver les difficultés de mobilité.  La formidable réussite du tramway et la rénovation du réseau de transport ont commencé CERTES à grignoter la prédominance de la voiture puisque nous serions arrivés à moins de 50 % de déplacements en voiture et que nous sommes passés en 8 ans de 90 millions à 150 millions de voyages sur le réseau TBM.

Mais ces succès réels ne parviennent pas à corriger en profondeur le phénomène de dépendance à l’auto, en raison de l’étalement urbain.

Je fais donc quelques propositions concrètes qui visent à travailler sur la modification des comportements et sur les nouvelles technologies au service d’une mobilité intelligente.

 

Rocade Intelligente

Sur le sujet, j'accueille avec satisfaction votre volonté d'étudier l'interdiction de la circulation des poids lourds sur la rocade à certaines heures comme une solution à la congestion et une alternative au projet de contournement.

Je pense qu’il faut aller plus loin et créer un groupe de travail resserré, composé de 2 ou 3 élus (sorte de task force) pour une Rocade Intelligente.

L’État doit rendre des comptes à la Métropole sur la Rocade.

Quand les accidents de Poids Lourds se multiplient pour non-respect des règles de distance de sécurité, c’est bien de la responsabilité du contrôle de l’Etat, qui ne fait pas respecter le code de la route, tout simplement.

Nous devons aller chercher l’État sur le sujet de façon beaucoup plus « musclée ». Le  bouclage en 3 voies (4 avec la bande d’arrêt d’urgence !!) doit bénéficier des nouvelles technologies dans son fonctionnement, pour faire en sorte que la 3ème voie mais aussi la bande d’arrêt d’urgence, puissent fonctionner de façon dédiée. Il est absolument nécessaire de travailler sur l’interdiction totale ou partielle du trafic poids lourds (que je réclame depuis 2003), sur l’accès limité à certaines heures, sur l’organisation de convois de poids lourds, etc. etc. Il faut multiplier l’usage de la voie nouvelle combinée avec la BAU. Il n’est pas acceptable qu’au 21 siècle on livre ces voies sans un début d’organisation intelligente. Il est essentiel que BM soit pro-active sur ce sujet, monte au créneau et aille chercher les solutions les plus innovantes. Ces initiatives permettraient de proposer de la fluidité. Si la situation actuelle est souvent insupportable pour nos concitoyens bloqués le matin et/ou le soir sur la rocade, la colère qui va avec cette situation ne doit pas pour autant inciter à reproduire les erreurs du passé. Plus le transport par la route aura de facilité, plus il se développera. Nous sommes dans une période de transition qui implique forcément un temps long pour modifier des tendances lourdes.

Ce groupe de travail ira chercher des solutions, organisera des rencontres, fera des propositions législatives si besoin auprès des députés locaux.

Nous devons agir aussi sur les comportements.  Pour cela je propose des idées qui doivent bien sûr être travaillées de façon approfondie.

 

Plan de déplacements  des 5 PATRONS

L’opération que j’appelle de façon triviale « 5 patrons » consiste à réunir le Préfet, le Recteur, les Présidents de Région et du Département ainsi que le Maire de Bordeaux (et Président de Bordeaux Métropole) dans un premier temps afin de créer un effet levier majeur.

Le cadre pourrait être celui de la charte des mobilités qui doit être mise à jour.

Ces « patrons » sont à la tête de plusieurs milliers d’emplois, pour beaucoup des emplois administratifs.

La proposition est simple et peu coûteuse, puisqu’il s’agit d’agir sur l’élasticité des horaires en autorisant le badgeage ou « pointage » dès 7 heures le matin, jusqu’ à 10 heures et le départ dès 15 heures jusqu’ à 19h30.

Arriver plus tôt ou plus tard et/ou  partir plus tôt ou plus tard.

L’étalement des horaires doit être une réponse à l’étalement urbain. Ainsi on peut espérer :

-          soulager la rocade, pour ceux et celles qui viennent de loin,

-          favoriser le covoiturage en multipliant les occasions de covoiturer sans que les heures de badgeage soient un frein,

-          faciliter les relations de mobilité entre des personnes ayant des employeurs différents mais se rendant au même lieu.

-          dé-saturer le tram

-          rendre plus accessible certaines lignes de TER ou de cars.

Pour que cela marche il est nécessaire d’avoir une décision commune avec une plateforme commune de covoiturage et d’échange de services mobilité.

Le télétravail doit accompagner ces dispositions et la lecture des mails au domicile également.

Cette opération peut avoir un effet levier sur d’autres employeurs privés également.

Elle pourrait aussi être accompagnée par des modifications d’horaires sur l’Université.

Elle doit être assortie d’un plan de communication de grande ampleur et associer les OS. Une expérimentation majeure.

Promouvoir le VAE

Promouvoir de façon forte l’achat de VAE par les salariés et actifs sur deux ans en portant la prime à 500 euros pendant 2 ans.

Je comprends bien que cette mesure peut avoir un impact budgétaire, mais le VAE est une vraie solution qui permet tout simplement de faire 10 kms en moins de 30 minutes. Il faut créer un choc !

Deux justifications, le Pont de Pierre fermé, il est nécessaire de proposer une vraie alternative. Il en va de même pour l’extension du stationnement payant. Le VAE est une vraie alternative à la seconde voiture. Il y a donc là un « foyer générateur » de modification des comportements qu’il faut accompagner.  (Par exemple les 17 km entre la mairie de Martignas et le Palais de Rohan peuvent se faire en 45 minutes en VAE). Un plan de communication de grande ampleur doit être mis en œuvre aussi. Par rapport à la situation actuelle il s’agirait de mieux cibler l’aide et d’élargir l’exonération.

 

Une gouvernance partagée en gironde dans le cadre du futur syndicat mixte :

-          Développer le réseau Transgironde en cars express avec retours tardifs et à chaque fois que c’est possible développer des voies express.

-          Renforcer l’attractivité des TER et surtout préserver la ligne du Verdon, véritable patrimoine en déshérence complète. Ce n’est pas que la ligne du Médoc, c’est aussi la ligne qui relie Bordeaux.

-          Développer des contrats d’axe avec les villes hors Métropole

Plan Bus

-          Doubler le nombre de kilomètres de couloirs de bus sur l’agglomération, 5 km par an n’est pas suffisant. (Cela nécessite de supprimer des places de stationnement).

Pour conclure, vous aurez compris aussi que le débat qui ressurgit sur le grand contournement par la proposition dite de « barreaux » par le versant est, en faisant la jonction des autoroutes de l’A63 à l’A10 est pour moi contraire à ce que je viens de proposer.

Outre l'interrogation sur l'utilité de ce projet et de son coût, il suffit de regarder la carte pour constater que si le passage par l'ouest a été très débattu, le passage par l'est amènera également un lot de fortes oppositions tant l'attachement à la géographie et au patrimoine du territoire est forte.

Nous aurons une rocade avec 4 voies, il y a quand même là le moyen d’agir.

Mais au-delà des difficultés écologiques posées par un contournement autoroutier, lorsque l'on fait le total de l'ensemble des propositions et des besoins en termes d'infrastructures lourdes qui sont sur la table - LGV GPSO, contournements autoroutier et ferroviaire, maintenance et rénovation des lignes TER et des trains Intercités, bouclage de la rocade - on peut s'interroger sur la capacité qu'auront l' État et les collectivités à les financer, même s'il est fait appel à des financements privés et à des ressources fiscales de type écotaxe.

Cependant, je propose une réflexion régionale et globale sur le sujet. Pourquoi ne pas envisager un système de contrainte, interdiction et péage poids lourds sur l’agglomération ?

 

 

Il est nécessaire également que les assises de la mobilité proposent un plan national vélo avec des crédits pour favoriser des investissements qui sécurisent sa pratique (pistes et bandes cyclables, parkings sécurisés, etc.) Il est anormal que les investissements pour les mobilités douces comme le vélo s'appuient quasi uniquement sur les finances des collectivités locales alors que les bénéfices sont très larges pour la santé publique.

Autre mesure, je propose de taxer chaque place de parking des grandes surfaces à raison de 50 € par an. Cette recette pourrait être affectée directement aux transports publics comme le VT.

Transport collectif et intermodalité.

Aujourd'hui, la plupart des grandes métropoles se sont dotées d'un réseau de transport en site propre, puisqu'il y a 28 réseaux de tramway en France. S'il existe encore des besoins dans ce sens, il est urgent de porter les efforts sur l'intermodalité avec tous les autres modes. En effet un réseau lourd ne peut aller partout. En revanche il faut améliorer la connexion entre les modes.

Il est nécessaire ainsi de proposer une meilleure intégration du vélo dans l'offre des transports collectifs, TER notamment et cars interurbains. Le transport du vélo dans les TER doit être favorisé, comme cela est le cas dans les pays nordiques : il permet une vraie intermodalité. Les gares, les pôles d'échanges doivent proposés des parkings sécurisés de grande envergure dans ce domaine, l'offre doit précéder le besoin comme le démontre une étude du GART sur le sujet.

 

Baisser le coût du tramway et promouvoir le tram-train.

Le coût d'un kilomètre de tramway est aujourd'hui le plus souvent largement au-dessus de 20 millions d'euros. Cette inflation a plusieurs raisons : des aménagements urbains d'accompagnement de façade à façade, de la responsabilité du Maître d'ouvrage, des exigences et des normes qui augmentent les coûts, sans toutefois être toujours justifiées, des délais de procédures et de réalisations qui s'étalent sur 5 à 7 ans, des règles de marché public qui participent à la hausse des prix.

Si notre société veut répondre aux exigences de l'enjeu climatique, le transport collectif en site propre doit être favorisé et protégé. Je propose ainsi qu'un audit général des réseaux soit engagé afin de faire des propositions pratiques et de continuer son développement et fixer un objectif de moins de 15 millions d'euros du kilomètre en moyenne pour la réalisation d'un tramway. Cet audit associerait tous les acteurs de la filière.

Il convient également de proposer une mission pour développer les projets de tram-train en utilisant les réseaux ferrés urbains et interurbains existants. En effet la plupart des grandes agglomérations possèdent des réseaux ferrés urbains ou lignes de ceinture qui peuvent être utilisés et maillés au réseau urbain. Le casse-tête juridique et administratif entre la tutelle de la SNCF et la volonté des Régions et des agglomérations est le principal obstacle à son développement.

 

Résumé des propositions :

  • Restriction de la circulation des poids lourds sur la rocade, avec péage.
  • Prime de 500 euros en 2018 et 2019 pour l’achat d’un VAE.
  • Plan national vélo avec crédits d’investissements pour les infrastructures vélo.
  • Taxer chaque place de parking des grandes surfaces à raison de 50 € par an.
  • Développer massivement l’intermodalité vélo, TER et cars.
  • Fiabiliser le car, lignes express, retour tardif, voies express, rack vélo.
  • Étude de la réduction des coûts du tramway vers 15 millions d’euros le km.
  • Promouvoir le tram-train.
  • Instaurer un titre unique de transport normalis2.
  • Instaurer des plans de déplacements des salariés dans les entreprises.
  •  

 

 Gérard CHAUSSET

 

 

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